Bellaud de la Bellaudière

Bellaud dans la création contemporaine

Bellaud a inspiré et inspire encore de nos jours de nombreux écrivains, artistes et passionnés des Lettres d’Oc. Son œuvre est amplement citée dans le Trésor du Félibrige de Frédéric Mistral, entre autres. Nous ne pouvons ici embrasser l’ensemble des créations qui se nourrissent aux sources de sa poésie, nous en avons choisies quelques-unes qui nous semblaient refléter la diversité de l’influence bellaudine à l’époque contemporaine.

Jean-Yves Royer

Jean-Yves Royer<cite>Òbras en rimas</cite>, dedicadas a Loís Belaud, Forcalquier, Enric Damia et Joan-Luc Olivo, 1980.Jean-Yves Royer a grandi à Forcalquier, dans les Alpes de Haute Provence. C’est auprès de sa grand-mère qu’il a puisé dans l'héritage occitan traditionnel une langue charnelle. Il a exercé de multiples métiers : enseignant, berger, acteur, peintre, sommelier, entre autres… Chercheur, écrivain, conteur et conférencier, il a de nombreuses cordes à son arc ! Auteur d'ouvrages concernant l'histoire locale, il a édité plusieurs manuscrits occitans médiévaux et collabore à de nombreuses revues et périodiques. Il est un grand connaisseur de l’œuvre de Louis Bellaud qui lui a inspiré deux recueils poétiques faisant écho, au-delà des siècles, au sonnetiste provençal : Òbras en rimas et Les Temps Passats. Jean-Yves Royer a su jouer avec les contraintes qu’impose le sonnet classique pour évoquer, dans une veine baroque revisitée, les plaisirs, les ruptures, le bouleversement des sens et des sentiments d’une vie pleine à ras-bord.

Bibliographie

  • Jean-Yves Royer, Òbra en rimas, dedicadas a Loís Belaud, Forcalquier, Enric Damia e Joan-Luc Olivo, 1980.
  • Jean-Yves Royer, Les Temps Passats, Montpeyroux, Jorn, 2006.

Extrait

Òbra en rimas, dedicadas a Loís Belaud, Forcauquier, Enric Damia e Joan-Luc Olivo, 1980, Sonet IX.

Graphie originaleTraduction française
Coma lo pastagàs trebolent l’aiga pura
Ton imagi vuejat au veire de mon còr
Lo fai fernir de tant e tremolar tan fòrt
Que ne’n ven pallineu coma la neu de Lura.
L’amarum que congrea e que se l’i amadura
Ne’n fai una mauresca, e se perdo lo nòrd
Me gelan de glaçons dins lo pitre a plen bòrd
E s’ansin siáu mon bar, tu siás ma barradura ;
Dura barra onte fas dau papagai belàs
E ieu canarí enmieg lei fuelhas mòrtas
Ambé lo pom d’amor de mon arma per òrta,
Aqueu barrejar doç ne’n siáu totara las :
Lo tieu aperitiu me fai l’apètit paure
E me despatissent de tu vau beure aure.
Comme le pastis troublant l’eau pure
Ton image vidée au verre de mon cœur
Le fait tant frémir et trembler si fort
Qu’il en devient pâle comme la neige de Lure.
L’amertume qui se crée et qui y mûrit
En fait une mauresque, et si je perds le nord
Des glaçons me gèlent dans la poitrine à ras bord
Et ainsi, si je suis mon bar, tu es ma fermeture ;
Dure barre où tu joues au beau perroquet
Et moi au canari entre les feuilles mortes
Avec la tomate de mon âme à travers les jardins,
Ce doux brassage j’en suis déjà fatigué :
Ton apéritif me donne peu d’appétit
En me dépastissant de tu je vais boire ailleurs.

Michel Miniussi

Tapuscrit de Michel Miniussi, édition moderne avec adaptation en graphie classique du premier recueil des <cite>Obros et Rimos</cite> de Louis BellaudNé à Paris en 1956, Michel Miniussi a passé sa jeunesse à Cannes dans une famille attachée à la culture provençale. Il fit des études universitaires à Montpellier et sous la direction de Robert Lafont il se spécialisa dans la littérature occitane. Son premier roman Jiròni parut en 1988. Collaborateur régulier de la fameuse revue OC, il se fit remarquer par son style unique, la délicatesse et la richesse de sa langue sous une plume maîtrisée. Il mourut trop jeune, en 1992, laissant derrière lui une œuvre manuscrite immense que l’association des Amis de Minuissi s’efforce aujourd’hui de faire connaître et de publier. Miniussi était un grand lecteur de Louis Bellaud, il travailla sur une édition moderne avec adaptation en graphie classique du premier recueil des Obros et Rimos dont les archives manuscrites et le tapuscrit ont été confiés au CIRDOC. La publication posthume de son œuvre (qui reprend le titre du dernier recueil bellaudin) Lei Passatemps a obtenu le prix littéraire Antigone.

Bibliographie

  • Michel Miniussi, Lei Passatemps, Mougins, Les amis de Michel Miniussi, 1995.

Rodín Kaufmann

Ferrotype de Rodín Kaufmann © Jonathan Max PierredonRodín Kaufmann est un artiste de la scène actuelle occitane, membre du Còr de la plana et créateur de multiples projets dont le groupe Uèi qui a adapté, notamment, un poème du poète baroque Pey de Garros : « Manténguer riòta ». Il est chanteur, rapeur, auteur, compositeur, interprète, poète, sound designer et graphiste, inventeur de formes, d’ondes ou d’images pour dire le monde d’aujourd’hui, en langue d’oc. Il a publié l’album Ara mêlant poésie déclamée et explorations sonores. En 2015 à la demande du CIRDOC il a présenté Claus Sens Clau une exposition qui mêle dessins, vidéos, installation, collages, sérigraphie et création sonore. En 2021, sa nouvelle création Pantais Clus voit le jour. Dans le cadre du colloque « La littérature carcérale à travers les siècles et les langues » et en lien avec le travail effectué par le CIRDOC autour de l’œuvre de Bellaud, il a mis en musique des extraits du Don-Don Infernal.